Aristide persécuté pour dédouaner Martelly !
Par Marie Laurette Numa
Depuis environ 8 jours, on n’entend parler à travers les
médias que d’un mandat de comparution à l’endroit de
l’ex-président, Jean Bertrand Aristide, émis par le juge
d’instruction tètkale, Lamarre Bélizaire. Ce mandat n’a
jamais été signifié ni à sa résidence ni à son avocat, Me.
Mario Joseph, alors qu’Aristide devait comparaître par
devant ce juge le mercredi 13 Août dernier. Etant donné
qu’il n’avait pas reçu ce mandat en bonne et due forme, il
n’a pas comparu. En tant qu’honnête citoyen manifestant
toujours un grand respect pour la justice de son pays,
Aristide a demandé à ses avocats d’adresser une
correspondance au juge Lamarre Bélizaire, d’ailleurs décrié
par plus d’un, à telle fin que de droit. Précipité dans son
entreprise maffieuse, le juge à bracelet rose a transformé
le mandat de comparution en mandat d’amener.
Le président Aristide, revenu dans son pays depuis le 18
mars 2011, reste chez lui et son temps est consacré à
l’éducation des jeunes haïtiens. Au cours de ce week-end
écoulé, on a appris que le mandat d’amener est retourné à
son point d’origine et que le président Aristide devrait
comparaître ce lundi au Cabinet d’instruction. Mais comme on
le sait, le juge tètkale Lamarre Bélizaire parti à
l’étranger pour se faire soigner d’une poussée
d’hypertension est revenu le lundi 19 en début d’après-midi.
C’est vraiment une véritable scène de théâtre !.
De toute façon, Jean Bertrand Aristide récuse le juge
Lamarre Bélizaire. L’acte de récusation a été signifié au
greffe du tribunal de Première Instance selon le vœu de la
loi pour « suspicion légitime », depuis le jeudi 14 Août
2014 par ses avocats, qui, selon ces derniers, travaillent
sur les documents à déposer à la Cour de cassation. La
récusation est la procédure par laquelle le plaideur demande
que tel magistrat s’abstienne de siéger, parce qu’il a des
raisons de soupçonner sa personnalité à son égard. La
récusation peut entraîner une autre juridiction, selon le
lexique des termes juridique de Dallez, 10e
édition de l’année 1995.
L’article 429 du code d’instruction criminelle mis à jour et
annoté par Menan et Patrick Pierre Louis, enchaîne ainsi :
« En matière criminelle, correctionnelle ou de police, la
Cour de Cassation peut, sur la réquisition du Commissaire du
Gouvernement près ce tribunal, renvoyer la connaissance
d’une affaire, d’un tribunal criminel, d’un tribunal
correctionnel ou de police, à un autre tribunal de même
qualité, d’un juge d’instruction à un autre juge
d’instruction, pour cause de sûreté publique ou de suspicion
légitime. Ce renvoi peut aussi être ordonné sur la demande
des parties intéressées, mais seulement pour cause de
suspicion légitime. »
La jurisprudence complète ainsi cette thèse : « Les
récusations exercées contre les juges d’instruction
constituent de véritables demandes en renvoi pour cause de
suspicion légitime.
En matière de renvoi pour cause de suspicion légitime, le
Tribunal de Cassation ne peut ordonner une enquête pour la
preuve des faits reprochés au juge. Une telle mesure n’est
permise à ce tribunal que lorsque, après cassation, il
statue en Sections réunies dans les attributions de
tribunaux ordinaires. La demande en dessaisissement exige,
au surplus, une prompte solution et doit reposer, non sur
des articulations de faits que l’on offre à prouver
ultérieurement, mais sur des preuves existantes ou des
présomptions résultant de faits établis. »
Le juriste, Me. Jaccéus Joseph a fait savoir que l’acte de
récusation est fondé tant sur la forme que sur le fond en
cette matière. Le mandat d’amener émis contre l’ancien
président Jean Bertrand Aristide, la semaine écoulée, est
suspendu jusqu’à nouvel ordre, suite à la récusation du juge
d’instruction en charge du dossier, Lamarre Bélizaire.
« Au regard de l’article 429 du Code d’Instruction Criminel,
le juge d’instruction qui instruit le dossier peut être
récusé pour cause de suspicion légitime », a-t-il indiqué,
prenant ainsi le contre-pied de certains juristes qui
laissaient croire qu’on ne peut pas récuser un juge
d’instruction. Il a précisé cependant que, « si le juge
d’instruction joue le rôle de police judiciaire,
c’est-à-dire, s’il enquête sur un dossier où il y avait
flagrant délit, il ne peut pas être récusé. » Le mandat
d’amener émis contre l’ancien président Aristide ne peut pas
être exécuté, jusqu’à ce que la Cour de cassation se
prononce sur les motifs de la récusation. « La Cour de
cassation, qui n’a pas de délai précis pour se prononcer sur
la récusation, pourra décider, en analysant les motifs, si
le juge d’instruction Lamarre Bélizaire doit ou non
continuer à instruire cette affaire», a-t-il ajouté.
Avant même que l’affaire soit entendue par une justice dont
la balance n’a pas été équilibrée, des exceptions ont été
soulevées par des hommes de loi, toutes tendances
confondues. Elles sont nombreuses : présomption d’innocence,
exceptions ratione loci, ratione personae, ratione materae.
Selon l’ex-commissaire du gouvernement de la juridiction du
Sud-Est du pays, Me. Claudel Lamour : « Le juge est saisi
sur des faits, il ne peut pas prendre des mesures
restrictives, comme l’interdiction de départ contre un
présumé innocent. » Il ne peut pas inculper une personne
avant de l’entendre. Me. Jean Renel Sénatus également
ex-commissaire du gouvernement de Port-au-Prince est
intervenu pour faire savoir : « Les actes du juge Lamarre
Bélizaire violent les droits, les libertés et foulent au
pied les lois de la République.»
D’une façon générale, l’opinion publique à travers des
émissions libres dans les médias condamne l’action intentée
contre l’ex-président, Jean Bertrand Aristide, représentant
national de l’Organisation politique Fanmi Lavalas et leader
charismatique du peuple haïtien. Cette action est largement
qualifiée de persécution politique, de complot contre le
peuple haïtien, de marchandage politique, de machination
politique à l’approche d’éventuelles élections.
Depuis le mercredi 13 Août 2014, date à laquelle le
président Aristide devait comparaitre au cabinet
d’instruction d’un juge motivé politiquement, des centaines
de membres, de l’Organisation politique Fanmi Lavalas sont
mobilisés non seulement devant les locaux du Palais de
Justice, au bicentenaire, mais également devant la résidence
privée du président Aristide à Tabarre. Ils y sont restés
mobilisés jour et nuit jusqu’au lundi 18 mars 2014. Au
Boulevard 15 octobre à Tabarre, au niveau de sa résidence,
des barricades de pierres, de carcasses de voitures, de
pneus enflammés et de toutes sortes d’objets trouvés
alentour ont été érigés . « Pour arrêter le président
Aristide, on doit nous passer dessus. Nous sommes ici en
solidarité avec le père de la démocratie en Haïti. Martelly
et ses gangs voulaient kidnapper à nouveau président
Aristide. Tant que nous sommes ici devant la résidence du
président Aristide, aucune arrestation ne pourra être
effectuée. Pourquoi Martelly le persécute-t-il ? Nous
sommeillions, voilà que Martelly nous réveille. Malgré
toutes ses dérives, il reste toujours au pouvoir. Il a
procédé à libération illégale d’un chef de gang, des
élections n’ont pas été organisées depuis 4 ans, il a échoué
dans sa gestion et il veut persécuter président Aristide.
Nous ne le laisserons pas franchir ce Rubicon, » déclarent
les supporteurs du président Aristide.
Ce lundi 18 Août, le Comité exécutif de l’Organisation
politique Fanmi Lavalas a donné une conférence de presse à
la Fondation Dr. Aristide pour la Démocratie en présence de
centaines de membres de Fanmi Lavalas qui se rendirent par
la suite devant la résidence du président Aristide pour
continuer de lui apporter leur solidarité. Au cours de cette
conférence la coordonnatrice de Fanmi Lavalas, Dr. Maryse
Narcisse a dénoncé dans toute sa rigueur la persécution
politique exercée à l’endroit du représentant national de
Fanmi Lavalas.
Selon elle, ce sont des manœuvres politiques et de diversion
qui tendent à détourner l’attention du peuple haïtien sur
les vrais problèmes auxquels il fait face quotidiennement,
tels : la cherté du coût de la vie, le déguerpissement des
centaines de familles du centre-ville, le délogement des
paysans de l’Ile-à-Vache, la catastrophe dans les résultats
des examens d’Etat cette année, la non réalisation des
élections depuis 4 ans, l’échec de l’accord de El Rancho, la
libération spectaculaire du chef de gang, Clifford Brandt
entre autres. Elle dénonce également la violation des droits
humains dans cette affaire fabriquée de toutes pièces dans
un laboratoire avec la participation d’un petit groupe
d’ennemis de la démocratie. Fanmi Lavalas ne se laissera
pas exclure aux élections. Fanmi Lavalas continue d’exiger
des élections libres, honnêtes et démocratiques. » a-t-elle
déclaré.
L’ex-député Lionel Etienne de son côté a enchaîné pour
dire : « Le peuple haïtien n’accepte pas et n’acceptera
jamais qu’un pouvoir réactionnaire, rétrograde issu de
l’idéologie macouto-duvaliériste utilise la justice pour
persécuter un honnête citoyen qui se met loyalement au
service de son peuple. » L’un des membres de la Commission
de communication de Fanmi Lavalas, Ansyto Félix quant à lui
exige la libération des prisonniers politiques en
l’occurrence : Jean Robert Vincent, Josué et Enold Florestal,
Louima Louijuste. Selon lui la mobilisation doit continuer
contre le pouvoir tètkale-duvaliériste qui tente
d’instrumentaliser l’appareil judiciaire à des fins
politiques.
D’un autre coté, les avocats du président Aristide dans
cette affaire dont Me Mario Joseph et l’ancien duvaliériste,
jadis pro-Martelly Gervais Charles ont indiqué à la presse,
ce mardi 19 août, qu’une pétition a été adressée à la Cour
Interaméricaine des Droits Humains (CIDH) de concert avec
les avocats étrangers pour les violations des droits d’un
citoyen. Ce que Fanmi Lavalas dénonce dans cette affaire.
L’appel à la mobilisation est maintenu partout dans le pays
pour contrecarrer toute forme de persécution politique
contre le président Jean Bertrand Aristide.
La Coordination Dessalines (KOD), pour sa part, dans une
note pour la presse a « apporté sa solidarité avec les bases
populaires de Fanmi Lavalas qui sont mobilisés dans les rues
contre les attaques de persécution de la part de Martelly-Lamothe
cachant ainsi leur culpabilité dans cet immense gâchis et
imbroglio politico-judiciaire. Ce projet de convoquer
l'ancien président Aristide est un moyen de distraire la
population.
KOD demande à la direction de Fanmi Lavalas de mettre fin à
sa politique de confusion, qui fait l’affaire de l’ennemi,
et qui donne l'espace nécessaire à Martelly pour persécuter
Aristide, faisant de lui presqu’un outil politique
involontaire au service du pouvoir. |