Martelly et Lamothe doivent partir !
Par Isabelle L. Papillon
Lors
des deux dernières manifestations du vendredi 5 et du samedi
6 décembre 2014, lancées par l’Opposition, un peu partout à
travers le pays, le départ de l’occupant du Palais national,
Michel Joseph Martelly a fait l’unanimité. Des centaines de
milliers de personnes, venues de tous les secteurs de la vie
nationale et de tous les quartiers populeux, sont descendues
dans les rues pour dire aux puissances coloniales et
impérialistes que le peuple haïtien en a assez, de venir
enlever les deux colis encombrants : Laurent Salvador
Lamothe et Michel Joseph Martelly, imposé à la tête de la
première République noire du monde par des élections
frauduleuses en 2011.
Après l’ambassade des Etats-Unis, le 29 novembre dernier,
les manifestants se sont rendus devant l’ambassade de France
et du Canada, puis devant le Palais national pour sommer
Martelly de partir. C’était le même son de cloche de la
population du Nord du pays, le samedi 6 décembre. Dans le
sud du pays en commémorant le 85e anniversaire du
massacre des paysans à Marche-à-Terre par des soldats
yankee, le 6 décembre 1929, la population réclamait
également le départ de l’équipe tètkale du pouvoir.
A Port-au-Prince, c’est avec ces cris que les manifestants
démarrent chaque journée de mobilisation par devant l’église
de St-Jean Bosco : « Martelly doit partir ! Martelly doit
partir ! Martelly doit partir ! A bas Martelly ! Martelly
dehors du Palais ! Nous restons dans les rues jusqu’à ce
que Martelly et Lamothe partent. Nous ne voulons pas de ce
régime. Martelly divise nos familles, détruit notre système
éducatif, détruit les institutions républicaines, persécute
notre leader, Dr. Jean Bertrand Aristide, emprisonne nos
frères pour leur conviction politique, tue nos camarades de
combats…. »
Après avoir parcouru le quartier populeux de la Saline, l’un
des bastions de Lavalas, la foule surchauffée s’est dirigée
en direction de la rue Saint-Martin pour se rendre au Bel
Air où une branche de la manifestation se réunit. Partis du
Bel Air, les manifestants anti-Martelly ont sillonné la rue
St-Martin, le quartier Solino, les rues Sans-Fil et Borgella,
la rue des Miracles se rendant devant le Parlement haïtien,
pour dire aux parlementaires que leur mandat arrive à
échéance et qu’ils doivent partir. Ils se sont ensuite
dirigés vers la Primature pour sommer le Premier ministre
corrupteur, maffieux, racketteur, minable, Laurent Lamothe
de vider les lieux. En scandant « Arrêtez Lamothe ! A bas
Lamothe ! Lamothe doit partir. Lamothe est en train de faire
business avec l’Etat. Lamothe vole 5 milliards de gourde.
Lamothe transfère 700 millions de dollars US en République
Dominicaine, Lamothe vend à l’Etat des lampadaires à 3000 $
US l’unité, Lamothe est un fieffé menteur. »
En passant devant les tribunaux du Palais de justice, au
Bicentenaire, les manifestants scandaient : « Arrêtez
Lamarre Bélizaire ! Lamarre Bélizaire est un vendeur de
justice. Lamarre Bélizaire est un corrompu. Le peuple va
juger Lamarre Bélizaire. Lamothe a donné à Céant 40 millions
de dollars pour démolir les maisons de 63 familles au
centre-ville. Lamothe est un criminel ! Me Céant est un
criminel. Nous les attendons aux élections. On va les
sanctionner. » Ils ont ensuite parcouru plusieurs rues de la
capitale avant d’arriver devant l’ambassade de France en
Haïti, à la rue Capois. Et là, les manifestants ont
dit « Non à l’ingérence étrangère. La France doit restituer
à Haïti les 90 millions de franc or escroqués de la jeune
République des Nègres. Cette somme est évaluée à plus de 21
milliard de dollars US depuis l’année 2003. Laissez le
peuple haïtien prendre son destin en main. Cessez de violer
le doit à l’autodétermination du peuple haïtien. » Des
manifestants ont brandi des photos du président de la
Russie, Vladimir Poutine pour montrer au monde qu’on veut se
libérer du joug impérialiste étasunien et colonialiste
français.
Après avoir délivré le message de circonstance à la France,
la foule a pris tête droite la direction du Palais national
en passant devant la Faculté d’Ethnologie. Les mains en
l’air, les manifestants sont arrivés à pénétrer le
périmètre du Palais national, restant jusqu’à date un
véritable défi pour les protestataires anti-Martelly : «
Nous y arrivons aujourd’hui. Nous sommes devant le Palais
national, pour dire à monsieur Martelly, vous n’êtes plus le
président, vous devez partir. Le peuple est souverain, la
voix du peuple, c’est la voix de Dieu. Le peuple a décidé,
c’en est fait. Nous sommes plus de 4 millions Haïtiens dans
les rues à travers le pays qui revendiquent votre départ.
Alors que seulement 700 mille personnes vous ont approuvé
après avoir été sélectionné par l’OEA et l’ONU et le Premier
ministre d’alors, Jean Max Bellerive. La Communauté
internationale a échoué avec Martelly. Elle doit se
ressaisir, » déclaraient les manifestants.
Le lendemain samedi 6 décembre 2014, c’était la même chose,
à la différence qu’ ils se sont rendus devant l’ambassade du
Canada à Delmas 75 pour dire NON à l’ingérence étrangère
dans les affaires internes d’Haïti. « Nous voulons la
coopération avec toutes les Nations du monde, mais pas qu’on
s’immisce dans les affaires d’un autre Etat indépendant et
souverain. Les Etats-Unis, la France et la Canada
symbolisent le triangle de la mort pour le peuple haïtien, »
déclaraient les protestataires.
De l’ambassade du Canada étant, ils prennent la direction de
la route de Bourdon vers le Palais national la tête droite.
Arrivés au Champ-de-Mars les agents des unités de la Police
Nationale leur en ont interdit l’accès. Les manifestants ont
essayé de contourner les cordons de policiers, ils ont
pénétré l’aire du Champ-de-Mars par petits groupes, ils ont
débarrassé les places publiques entourées de tôles rouges.
« Regarde le peuple haïtien, Martelly et Lamothe sont des
bluffeurs. Il n’y a aucun travail à l’intérieur des tôles
rouges. Ils ont empêché à la population l’accès aux places
publiques pour rien.
Martelly doit partir ! Lamothe doit partir ! Ils prônent
l’école gratuite, nous ne le voyons pas, les élèves n’ont
pas de professeurs, les professeurs manifestent dans les
rues pour exiger leur dû. » Les manifestants ont mis à nu le
régime constitué de bluffeurs, de menteurs, ayant à sa tête
Martelly et Lamothe.
Au Cap-Haïtien, la deuxième ville du pays, des milliers de
personnes ont également gagné les rues le samedi 6 décembre
à l’appel de l’Opposition constituée du Collectif des
militants pour la libération d’Haïti, branche MOPOD et Fanmi
Lavalas. Rassemblées au rond-point Samari, dès dix heures du
matin, les manifestants parcourent diverses rues de la ville
dont, shada, lòtbò pon, Barrière Bouteille, Vertières. Des
militants sont venus des 19 communes du département du Nord,
des communes du département du Nord ’Est et de l’Artibonite
pour participer à la grande mobilisation anti-Martelly. Les
manifestants vêtus tout de noir, disent venir chanter
l’enterrement du régime tètkale. « Nous ne voulons pas
négocier avec un dictateur, comme Martelly. Nous n’envoyons
personne négocier avec Martelly et les représentants yankee
en Haïti. Nous réclamons le départ de Martelly et ceci sans
condition. Nous ne reconnaissons pas la commission
consultative présidentielle constituée de GNBistes et
putschistes. Son rapport sera rejeté par le peuple comme il
l’a fait pour El Rancho.
En 2003-2004 Martelly participait au côté du groupe des 184
d’André Apaid, Charles Henry Baker, Réginald Boulos, Rosny
Desroches et consorts, représentants l’oligarchie haïtienne,
pour kidnapper le président Aristide. En 2014, c’est le
peuple tout en entier qui se soulève contre Martelly. Le
sénateur Moïse Jean Charles, farouche opposant au régime
tètkale, présent à la manifestation, continue d’exiger, lui
aussi, le départ de Martelly. « C’est définitivement la fin
du régime. Nous ne comptons pas les fêtes de fin d’année
2014 avec Martelly au pouvoir. Nous ne sommes pas dans la
négociation avec Martelly. Nous ne voulons que le départ de
Martelly et de Lamothe, » a-t-il déclaré en substance.
En somme, ces trois dernières manifestations à
Port-au-Prince et au Cap-Haïtien, sans oublier Petit-Goâve
qui manifeste quotidiennement contre Martelly, réveillent la
conscience collective contre Martelly. Toutes les couches de
la population ont pris part aux manifestations : des gens
des quartiers populeux, des chômeurs, des ouvriers et
responsables syndicaux, des artistes, des hommes aux cheveux
tressés, protestent contre la violation de leurs droits ;
des femmes qui subissent des harcèlements sexuels de la part
des proches du pouvoir tètkale, des professeurs, des
écoliers, des étudiants à l’UEH, des chauffeurs de taxis
moto, des petits commerçants brandissant des pancartes « Aba
SGS sansi woz !». Des entrepreneurs et ingénieurs de la
classe moyenne décapitalisés, des travailleurs de profession
manuelle tels : des contremaîtres, des maçons, des
charpentiers, ferrailleurs, plombiers, électriciens et
autres se plaignent d’être abandonnés par le pouvoir tètkale
au profit des compagnies dominicaines. Pour eux, le pouvoir
tètkale ne dirige que dans l’intérêt de ses amis et des
étrangers. Les nationaux sont livrés à eux-mêmes, victimes
de l’insécurité récurrente.
Pour preuve, 5 personnes sont mortes lundi premier décembre
2014 à Cité Soleil, lors de l’affrontement de deux groupes
de gangs constitués par les bras armés du pouvoir rose
tètkale. Ce même jour, un employé de l’Autorité Portuaire
Nationale (APN), l’étudiant à l’INAGHEI, Frantz Compère, âgé
de 35 ans a été victime d’une attaque armée à la Saline en
sortant de son travail. Il a reçu 5 balles des bandits
armés, alors qu’il circulait à bord d’une moto. Il a rendu
l’âme sur le champ.
Fanmi Lavalas appelle tous ses membres, partisans
sympathisants, travailleurs, paysans, chômeurs étudiants,
ouvriers, professeurs, les victimes du goudougoudou Lamothe-Céant
au centre-ville à rester mobilisés contre le pouvoir. Le
prochain rendez-vous sur le béton est fixé pour le vendredi
12 décembre en prévision de l’éventuelle visite du
secrétaire des Etats-Unis en Haïti. En attendant d’autres
manifestations se poursuivent pour des revendications
spécifiques telles : eau potable, électricité, le paiement
des arriérés de salaire des professeurs, des employés des
mairies de la zone métropolitaines contre l’augmentation des
taxes sur les petits entrepreneurs, contre la violation des
droits humains à l’approche de la célébration du 66e
anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits
l’Homme, le 10 décembre 2014. Le peuple haïtien doit
continuer à revendiquer le respect de ses droits à la
souveraineté et à l’autodétermination.
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