Les dirigeants politiques haïtiens et les représentants des
puissances impérialistes ont toujours pris un malin plaisir à
fabriquer toutes sortes de crises en Haïti pour asseoir leur
système de domination et d’exploitation des classes dominées.
Même quand la loi est claire sur un sujet, ils usent toujours
des subterfuges pour arriver à faire obstacle à son
application, recourant à un dialogue truffé de corruption. Le
dialogue suppose un ensemble de discussions visant à trouver un
terrain d’entente entre deux parties en conflit sur des
questions politique, économique et autres. Le nœud gordien de la
crise politique actuelle est la question des élections greffée
sur la crise structurelle que connait le pays. La question
électorale est déjà résolue par la constitution haïtienne. Il
suffit de la réaliser à temps pour assurer le principe de
l’alternance démocratique et le fonctionnement régulier des
institutions républicaines.
Depuis le Coup d’Etat-kidnapping du 29 février 2004, malgré la
présence physique et visible de ladite communauté
Internationale, à travers les forces d’occupation de l’ONU, la
Mission des Nation Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH),
les élections n’ont jamais été réalisées à la date prévue par la
constitution.
Aujourd’hui
encore on prétend ignorer la constitution pour recourir au
dialogue entre les classes dirigeantes dominantes aux ordres de
ladite communauté internationale, ce contre les intérêts du
peuple haïtien. L’immoralité, l’arrogance et les pratiques
dictatoriales du président tètkale Michel Joseph Martelly
constituent un véritable obstacle à tout dialogue entre les
« esclaves » d’un seul maître.
Après l’échec d’une rencontre convoquée par le pouvoir tètkale
avec les partis politiques, au début du mois d’Août dernier, le
président Martelly a entamé une série de pèlerinages chez
certains partis et leaders politiques sur la base d’un
soi-disant dialogue pour faire de la diversion et semer la
confusion dans la société, à un moment où la mobilisation anti-Martelly
prend un point de non retour. Certains chefs de partis acceptent
de le recevoir sans aucune condition et arrivent même à négocier
des postes de responsabilité au sein du pouvoir et d’autres
posent des conditions sine qua non pour le recevoir.
C’est le cas du Grand Rassemblement pour l’Evolution D’Haïti (GREH)
de l’ex-colonel Himmler Rébu qui revendique idéologiquement le
pouvoir tètkale, mais est opposé à certaines pratiques de ce
régime. Le président du GREH fraîchement élu, Marc-Elie Nelson,
étudiant finissant à l’Ecole de Droit et des Sciences
Economiques des Gonaïves (EDSEG), cette Faculté de renommé
douteuse, a été installé le mercredi 18 septembre dernier à la
direction générale du Ministère des Haïtiens Vivants à
l’Etranger (MHAVE) comme directeur général, pour justifier une
certaine ouverture du pouvoir tètkale-kaletèt aux partis
politiques. Est-ce le résultat de ce dialogue ? Rappelons
toutefois que Edric Léandre, membre du GREH était devenu
directeur général de l’OAVCT sous le gouvernement de facto de
Gérard Latortue. Il avait été accusé sous l’administration de
Préval de détournement de fonds publics. Son procès est toujours
en cours au Tribunal et il est gardé sous les verrous à la
prison civile, au pénitencier national depuis quelques années.
D’autres ont accepté de le rencontrer, mais restent très
prudents, tel est le cas des dirigeants de l’OPL, du KID, de la
Fusion des Sociaux-Démocrates. Quant à l’ex-président Jean
Bertrand Aristide, il s’agissait d’une rencontre entre un
président et un citoyen. Un éditorial écrit par Hérvé Jean
Michel diffusé sur les ondes de Radio Timoun, titrait ainsi :
Que pourrait dire le président
Tètkale
au Dr. Jean Bertrand Aristide ? « L’histoire est
réellement un lieu de surprise, elle s’accomplit sans qu’on ne
puisse la surprendre. Est-ce la ruse de la raison, la ruse de
l’histoire, la ruse de Martelly, qui a été conduit
tètkale à
Tabarre, à la résidence d’Aristide ?»
Aucune réponse n’a surgi de cet éditorial, qui pose des
questions sans prétention aucune de tenter de donner des
réponses. Martelly, tout le monde le sait, a joué un rôle
éminent dans la déstabilisation du pays et dans les coups d’Etat
consécutifs. Par une ironie de l’histoire, il est devenu chef de
l’Etat d’Haïti, ce même pays, qu’il a contribué à ruiner, à
humilier, à anéantir. Il s’est réveillé un jour et s’est
retrouvé au Palais national avec sur les bras, toute
l’infortune, toute la misère, tout le désespoir d’un peuple
martyrisé par l’oligarchie haïtienne, et l’impérialisme, au
service desquels il a voué un culte parfait. Autant de
responsabilités qui exigent d’un homme politique, d’un chef
d’Etat, des capacités intellectuelles et morales, des
connaissances adéquates du milieu, aptes à inventer des
solutions. Or, le président Martelly en est dépourvu.
Martelly,
était-il fait pour assumer la fonction de président de la
République d’Haïti ? Ses pratiques sociales, ses relations avec
le milieu haïtien, sa compréhension, sa conception, sa vision de
la vie et ses implications, l’ont-elles vraiment préparé pour
jouer un tel rôle ? Voilà cet homme, propulsé à la tête de ce
pays de malheur, par des politiciens apatrides d’Haïti et par
les colons qui ne jurent que par la tragédie, la disparition et
la mort d’Haïti. Il faut dire aussi qu’une frange dépravée de la
jeunesse sous l’influence du comportement malsain, dégradant et
dégoûtant de Martelly s’est laissée envoûter par ce petit roi de
carnaval pour lui donner leurs voix à la dernière élection
présidentelle.
Pris à son propre piège de vouloir imposer sa dictature, pour
mieux servir les intérêts de ses patrons, Martelly se heurte à
la farouche opposition de secteurs démocratiques, s’inscrivant
contre ce plan macabre. Se croyant le plus intelligent des
intelligents, Martelly voudrait revenir aux pratiques
dictatoriales duvaliéristes.
Cette ruse qui l’a conduit chez le Dr. Jean Bertrand Aristide,
le mercredi 18 septembre, devrait l’informer que ce dernier ne
pourrait et ne saurait se faire complice d’une politique
machiavélique, destinée à éradiquer les masses haïtiennes de la
surface de la terre. Le sort ne pourrait être éternellement
favorable à un homme qui a tout fait pour détruire les
espérances de la majorité. Aujourd’hui, Martelly semble vouloir
dire « tous les moyens sont bons ». Quand on est malade et
qu’on n’est pas certain de la guérison, on ingurgite n’importe
quel médicament prescrit par n’importe quel charlatan. C’est le
drame de Martelly, flanqué de son bâton de pèlerin, s’adressant
à tous les saints, à tous les Satan.
Ses bougies, il les allume au nom du bien, au nom du mal, au nom
de la raison et de la déraison, au nom de la vie et de la mort.
C’est la confusion dans toute son ampleur !Alors, que pourrait
bien dire Martelly à Aristide, un homme qu’il a toujours
insulté, combattu, écrasé ? Les souffrances d’Aristide étaient
les joies de Martelly, ses victoires, ses grandeurs, ses
richesses, ses délices et ses vertus. Aujourd’hui, ce même
Aristide, pourrait-il servir de pont, facilitant le passage de
Martelly à la dictature néo-duvaliériste ?
Si Serge Gilles s’est souvenu du bon vieux temps du
duvaliérisme, au point de verser des larmes, le lyrisme néo-duvaliérien,
ne saurait enfoncer Aristide dans la nostalgie. Alors, Martelly
ne pourra jamais puiser chez cet homme, la formule magique,
l’équation efficace pour plonger Haïti dans la dictature.
Le Mouvement Patriotique d’Opposition Démocratique (MOPOD),
regroupant une quinzaine de partis politiques n’écarte pas la
possibilité de rencontrer le président tètkale-kaletèt, mais il
pose des conditions. Les dirigeants de ce regroupement politique
ont été contactés par des proches du pouvoir kaletèt dans le
cadre d’une éventuelle rencontre devant déboucher sur un
dialogue politique. Pour les dirigeants de MOPOD, les portes
restent ouvertes, cependant le président Martelly doit
répondre à ces exigences qui sont au nombre de 7 avant d’entamer
tout processus de dialogue avec lui sur la situation politique
du pays :
« 1- Ordonner la libération des prisonniers
politiques, en particulier Enold Florestal, Josué Florestal et
Jean Robert Vincent.
2- Ordonner le retrait du mandat d’amener et
de l’ordre d’interdiction de départ émis contre Me. André Michel
et s’engager à respecter le droit de l’Opposition, des autres
secteurs de la société civile organisée et du peuple haïtien en
général à manifester sur la voie publique pour exprimer son
désaccord sur la gestion de la chose publique.
3- Présenter des excuses publiques pour les
propos désobligeants tenus à l’endroit des leaders de
l’opposition
4- Reconnaitre publiquement que la réunion
tenue avec le juge Jean Serge Joseph au Cabinet Me. Louis Gary
Lissade sur le dossier de corruption présumée impliquant les
membres de la famille présidentielle a été un abus de pouvoir et
s’engager à ne plus continuer sur cette voie.
5- S’engager à se séparer de ses proches
partisans dénoncés par la clameur publique dans le trafic
illicite de stupéfiants.
6- Ordonner le retrait de l’ordonnance
disgracieuse prise par le doyen du Tribunal Civil de
Port-au-Prince Me. Raymond Michel contre Radio Kiskeya et la
journaliste Lilianne Pierre-Paul dans l’affaire opposant le juge
Lamarre Belizaire et le Barreau de l’ordre des avocats de
Port-au-Prince, étant donné que cette décision constitue une
grave atteinte à la liberté de la presse et à la liberté
d’expression
7- S’engager à publier sans délai la loi sur
les partis politiques déjà adoptés par le Parlement. »
Plus d’un se posent la question: à quoi aboutira ce soi-disant
dialogue avec des dirigeants au pouvoir qui n’inspirent
confiance à personne et qui sont en perte de légitimité ?
Comment Martelly voudrait-il dialoguer avec des «voleurs de
bœufs, de cabris, de poules, d’œufs ?» Et les leaders
politiques, pourquoi ont-ils accepté de dialoguer avec un
président aussi arrogant, qui a déclaré : « Pandan
2 lane m rete pou m pase sou pouvwa a, sa m deside se sa k pou
fèt. »
Alors, il ne pouvait être plus clair. Il disait à tous ceux qui
veulent l’entendre, le dialogue ne servira à rien, ce n’est que
pour la consommation internationale. Pourquoi ont-ils accepté de
négocier avec un pouvoir qui n’hésite pas à bombarder des
manifestants avec du gaz lacrymogène ? Pourquoi ont-ils accepté
de dialoguer avec un président qui veut à tout prix dissoudre le
Parlement et rétablir la dictature pour enfin neutraliser toute
protestation populaire ?
Pour les organisations populaires et progressistes, c’est bien
compté mal calculé, le flambeau de mobilisation anti-Martelly
s’allume beaucoup plus pour exiger le départ inconditionnel du
régime dirigé par Martelly-Lamothe, qui n’a pour méthode de
fonctionnement que le mensonge, la corruption, l’arrogance,
l’arbitraire et qui livre le pays à des narcotrafiquants. C’est
dans cette perspective que des manifestations sont en cours de
préparation à travers tout le pays, pour le lundi 30 septembre
prochain, à l’occasion du 22e anniversaire du coup
d’Etat militaire sanglant du 29-30 septembre 1991, contre un
président fraîchement élu, Jean Bertrand Aristide contre lequel
l’actuel président Michel Martelly prit part activement aux
côtés de Michel François autoproclamé colonel à l’époque.
Il est évident qu’aucune élection n’est possible avec Martelly à
la tête du pays. Le dialogue n’aboutira à rien. La conviction de
Martelly est déjà formée de parvenir à dissoudre le Parlement
en s’appuyant sur des leaders politique qui n’ont aucune
représentativité au Pouvoir législatif. La seule force qui peut
faire échec à ce projet macabre de Martelly et de son équipe,
c’est la force populaire qui va investir les rues en masse le 30
septembre prochain pour dire NON au dialogue, OUI au départ ! |