Haiti Liberte: Hebdomadaire Haitien / Haitian weekly

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ARCHIVE DE GRANDS TITRES

Haiti-Liberte

 

Edition Electronique

Vol. 8, No. 28
Du  Jan  21  au  Jan 27. 2015

Electronic Edition

Kòrdinasyon Desalin: Conférence de presse

 

 

Massacre à Seguin!
Le régime de Martelly tue des paysans sans armes dans une autre expulsion controversée

par Kim Ives
...La police haïtienne a tué par balles quatre personnes et a détruit sept maisons dans une tentative de déloger 140 familles paysannes d’un parc situé au sommet d’une montagne rurale où ils ont vécu et cultivé depuis ces 70 dernières années.

La confrontation sanglante, qui a eu lieu exactement 25 ans jour pour jour après un infâme massacre en 1987 de paysans près de la ville du nord-ouest de Jean-Rabel, a enflammé la population du département du sud-est et a redoublé les accusations que le gouvernement du président Michel Martelly est en train de ressusciter les tactiques répressives des dictatures duvaliéristes et néo-duvaliériste qui ont régné en Haïti, et marqué le pays il y a deux décennies.

L'incident a été rapporté et photographié par Claudy Bélizaire de l’Institut de Référence pour Journalisme et Communication (RIJC), basé à Jacmel. Ses photos de cadavres ensanglantés et de maisons brûlées dans Galette Sèche / Seguin, une localité reculée voisine  des pics de certaines des plus hautes montagnes d'Haïti, ont fait sensation sur Internet, Twitter et Facebook. Entre-temps, les grands médias ont largement ignoré l'histoire à ce jour. ...

« Un commando composé de 36 agents de l’Unité Départementale du Maintien de l’Ordre (UDMO), dirigée par le Directeur départemental de la PNH [Police Nationale Haïtienne], accompagné du Délégué Départemental du Sud-Est, du Commissaire du gouvernement et un juge de Paix, se sont rendus à Seguin [Commune de Marigot] plus précisément au Parc La Visite, à bord de 6 véhicules et d’une ambulance de la Croix Rouge Haïtienne, pour lancer une opération visant à faire déguerpir les 140 familles, qui occupaient illégalement [depuis 1942 !], une partie de ce Parc, » a rapporté le RIJC.

« Furieuse de ce débarquement musclé et armé, la population locale a affronté les forces de l’ordre et lancé des pierres; selon des témoignages l’opération a duré 2 heures. De nombreux coups de feu ont été tirés contre les protestataires et... 5 policiers [auraient été] blessés, » d’après le RIJC. « Le corps de 4 victimes ont été retrouvés et identifiés [Désir Enoz - 32 ans, Nicolas David - 28 ans,  Robinson Volcin – 22 ans et Désir Aleis - 18 ans], 4 enfants sont portés disparus, 3 maisons complètement détruites par le feu et 4 autres saccagées, 3 bœufs ont été abattus.»

« Pourtant, le jour suivant ce dramatique incident, Ovilma Sagesse, Directeur de la police du Sud-Est, s'inscrivait en faux contre ces déclarations, affirmant que seulement 5 policiers avaient été blessés par les occupants du Parc. “ Face à l'agressivité de ces individus, nous avons dû suspendre l'opération pour éviter qu'il y ait des victimes...” Les corps des victimes au Parc La Visite, attestent pourtant le contraire... »  

Par téléphone, Claudy Bélizaire a dit à Haïti Liberté que la situation dans la région reste très tendue et la population très en colère. « La population a brûlé à peu près 100 hectares de forêt en pin en réponse à l’intervention des autorités, » Bélizaire nous a rapporté. Ce chiffre vient de Frantz Pierre-Louis, secrétaire général de la délégation du sud-est.

L'agronome Arcène Bastien, directeur départemental de l'Environnement du Sud-Est, dans les remarques qu’il a faites au Nouvelliste, a nié tout acte de violence des policiers contre les paysans vivant dans le parc La Visite, affirmant qu’« une trentaine de policiers qui accompagnaient une délégation de la Protection civile ont dû faire marche arrière, face à la colère de la population ». Il a essayé aussi de soulever le spectre d’un complot, affirmant au journal que « des fauteurs de trouble avaient infiltré la population et l'a dressée contre la délégation ».

Il semble, quand même, que ceux qui ont manifesté contre le déguerpissement des 140 familles ainsi que les victimes été tuées par balles n’étaient en aucune façon armés. « Ils n’avaient pas d’armes, ils lançaient des pierres », nous a rapporté Bélizaire.

Récemment le sénateur Moïse Jean-Charles a accusé le gouvernement et les grands propriétaires terriens dans le nord d'Haïti de commencer également à exproprier des paysans de leurs terres. Après la chute de la dictature des Duvalier en 1986, les paysans ont récupéré de nombreux terrains qui leur avaient été volés ainsi qu’à l'Etat pendant des décennies par les grandons, comme on appelle  les grands propriétaires terriens d'Haïti. «Aujourd’hui, avec l’accession de Martelly au pouvoir, tous les grannèg, grandons qui avaient accaparé des terres dans la région de Milot, se sont rassemblés autour de Martelly. Aujourd’hui, ils détiennent le pouvoir, et ils ont commencé  à nous attaquer », a déclaré le sénateur, qui était un leader du Mouvement Paysan de Milot dans les années 80, dans une longue interview accordée à Haïti Liberté (voir Haïti Liberté, Vol. 5, No. 51, le 4 juillet 2012).

Le 23 juillet 1987, des grandons près de Jean-Rabel ont massacré au moins 139 paysans affiliés à l’organisation paysanne Tèt Kole Ayisyen Tipeyizan, au moyen de fusils et de machettes. Puis, le grandon Nikol Poitevien est allé à la télévision haïtienne quelques jours plus tard faisant une déclaration restée célèbre : « nous avons tué 1042  communistes. »  

Dans une longue déclaration sur cet anniversaire, Tèt Kole a émis l’accusation que « les criminels marchent toujours libres au sein de notre société, nageant dans la corruption de l'Etat sans aucune inquiétude » et a dénoncé le gouvernement du président Martelly et de son Premier ministre Laurent Lamothe qui sont en train d’entreprendre la « liquidation » d'Haïti. 

Dans Le Nouvelliste, le commentateur Roberson Alphonse a caractérisé la tuerie à Seguin comme « un fiasco » et un « dommage » mais a argumenté que « dans le fond, les efforts pour récupérer cette aire protégée et réhabiliter les espaces boisés réduits en peau de chagrin sont nécessaires » et même « indispensables, compte tenu de la biodiversité du parc, mis en danger depuis des années par les cultures sarclées des occupants et la coupe non régulée d'arbres pour l'usage domestique. »

Dans son reportage, Bélizaire explique: « Après plusieurs heures de discussions avec les policiers cantonnés dans le sous-commissariat de la zone, des leaders de la communauté et des familles de victimes et voisins éplorés, un Comité de quatre membres a été constitué, sous la direction des Affaires Civiles de la Minustah…, un intermédiaire a été désigné par la population, afin de discuter avec les autorités tels que : Nadège Excellus, représentante des femmes victimes, Estinvil Sainvilus (ASEC), Jean Dais, leader communautaire, et Pierre Félix, membre d’une organisation de la zone. Des négociations qui n’ont pas abouti. Notons que depuis ce grave incident, aucun représentant de l’État ne s’est présenté à Seguin où des barricades ont été érigées par la population, en signe de protestation. Le seul élément connu se rapportant à cette négociation, était une enveloppe de 50,000 Gourdes [environ $1,250] promise à chaque famille (50% avant leur départ, 50 % après). Toutefois, cette offre, qui ne propose aucun lieu de relocalisation a été rejetée par les familles concernées, qui estiment cette somme insuffisante pour leur permettre d’acheter un terrain, trouver un lopin de terre agricole fertile et se reloger. »

Le Parc La Visite est l'un des trois parcs nationaux d’Haïti et possède l'un des dernières forêts de pins restants, dans un pays qui est déboisé à 98%. Il a souffert de l'exploitation forestière et de défrichement non autorisés au cours des dernières  décennies, ce qui a affecté les bassins d’eau versants des villes de Port-au-Prince et de Jacmel. Cependant, la violence pour déraciner les familles du parc est similaire à l’éviction des familles du bidonville de Jalousie de Pétion-Ville, une acte également défendu comme un impératif environnemental.

« Nous pouvons facilement comprendre la nécessité de défendre l'environnement en Haïti, mais tout déménagement doit être fait de façon équitable avec une compensation adéquate en planification afin que les personnes déplacées soient capables de trouver de nouvelles maisons pour ne pas être laissées sans abri », a dit Ronald Joseph, un résident de Jalousie, à Haïti Liberté. De nombreux habitants du bidonville se plaignent que les résidents riches vivant aussi, comme à Jalousie, sur la montagne connue comme le Morne Calvaire ne sont pas ciblés d'expulsion.

La situation à Seguin est devenue si tendue que la force d'occupation militaire des Nations Unies s'est sentie obligée de faire une déclaration pour se distancier de l'action du gouvernement Martelly: « La Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) est préoccupée par les rapports faisant état de la mort d’au moins quatre citoyens haïtiens et de plusieurs blessés, dans des circonstances non encore élucidées, au cours d’une opération d’expulsion forcée, conduite par des agents de la police nationale dans le Parc La Visite », a fait savoir la note de presse. « Une équipe multidisciplinaire des Nations Unies a été déployée sur le terrain pour collecter les informations afin de contribuer à établir les faits. La MINUSTAH rappelle que l’expulsion forcée sans alternative à un logement convenable est contraire aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, et  notamment au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ».

 
 
Vol. 6, No. 3 • Du 1er au 7 Août 2012
 

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