Par Thomas Péralte
Depuis
l’arrestation du kidnappeur Clifford Brandt, la présidence n’a
pipé mot. Ne serait-ce que pour justifier l’excellente
performance de sa police, le président aurait pu faire des
commentaires et même s’auto-féliciter, mais jusqu’à présent il ne
l’a pas encore fait. Et c’est la question que se pose plus d’un:
Martelly a-t-il le dos au mur dans cette situation ?
Alors que le Cabinet d’instruction commence à entendre le
présumé kidnappeur de la grande famille bourgeoise haïtienne,
Clifford Brandt Junior, le dossier continue à susciter des
débats dans différents secteurs de la vie nationale, surtout
après la publication d’un article de l’hebdomadaire
Haïti-Observateur
et titré : « Il n’est que le #5
de son réseau… ». D’autres articles ont été publiés pour essayer
de démontrer que l’affaire Brandt serait la conséquence du
fonctionnement social et économique de la bourgeoisie haïtienne.
Des émissions de radio ont également été réalisées sur les
origines de l’accumulation des richesses de cette bourgeoisie,
s’il en existe réellement, sa soumission au capitalisme
international et son rapprochement avec l’Etat en tant qu’entité
dominante de la classe dominante.
Selon l’article d’Haïti-Observateur, la structure de cet énorme
gang de Brandt serait composée en majorité de descendants de la
bourgeoisie et de ceux des propriétaires fonciers (grandon).
C’est un gang de kidnappeur macouto-bourgeois lié avec le
pouvoir en place. Le dossier Brandt n’est pas une affaire isolée
de la bourgeoisie haïtienne. Ce gang est dirigé et contrôlé par
des éléments de cette classe sociale improductive et corrompue,
qui, tout au long de son histoire, a accumulé toutes ses
richesses dans des activités spéculatives et commerciales.
Aujourd’hui, ne se sentant pas satisfaite suffisamment du mode
d’exploitation de l’homme par l’homme, elle s’investit
directement dans des activités de kidnapping pour faire de
l’argent beaucoup plus facilement et beaucoup plus vite.
Dans un article publié le jeudi 8 novembre dernier, sous le
titre « L’affaire Brandt ou le prix symbolique du
fonctionnement social et économique de la bourgeoisie »,
l’écrivain Lionel Trouillot a écrit : «
La bourgeoisie haïtienne
ne s’est jamais sentie obligée de faire semblant de proposer une
éthique républicaine. C’est aussi le fait que la bourgeoisie a
souvent utilisé la corruption des clercs, du politique, des
subalternes, pour maintenir ses privilèges. C’est tout cela qui
fait la confusion entre le crime social et le crime pénal dans
la sensibilité populaire ; c’est tout cela qui fait qu’on la
considère comme une " classe sans qualité " et qu’un acte commis
par un amène à parler de " ils ". J’ai entendu quelqu’un dire :
" ils ont enfin trouvé un domaine dans lequel ils font preuve de
leadership " ».
Il est clair qu’outre l’exploitation de l’homme par
l’homme, la bourgeoisie a utilisé tout autre moyen pour parvenir
à ses fins qui n’est autre que soutirer de l’argent. La mauvaise
réputation de la bourgeoisie haïtienne ne date pas
d’aujourd’hui. Après son accession au pouvoir, le président
Michel Joseph Martelly a fait appel au secteur privé pour
l’aider à la reconstruction du pays. Il a souvent déclaré que :
« Se lajan sektè prive a, se pa lajan Leta ». En janvier 2012, Armaud
Robert, un journaliste français du journal Le Monde a écrit un
article intitulé « Les Nantis d’Haïti ! » Et, il a
débuté ainsi : « Parce qu’ils ont soutenu les dictateurs, parce
que certains sont les rois de la sous-traitance à bas prix, les
riches Haïtiens ont mauvaise réputation. Mais le président
Martelly compte bien s’appuyer sur leurs capitaux pour
reconstruire le pays ». Alors qu’aujourd’hui des membres de la
famille du président Martelly sont cités comme étant de ceux qui
auraient reçu du kidnappeur Clifford Brandt des fonds
nécessaires pour mettre en œuvre les projets patronnés de la
première dame Sophia Martelly et son fils Olivier Martelly. Des
dénonciations ont été produites contre ces deux (2) membres de
la famille présidentielle qui nagent dans la corruption. Depuis
l’arrivée du régime
Tètkale
de Martelly-Lamothe au pouvoir, il y
a déjà 18 mois, le banditisme s’est installé dans les plus
hautes sphères de son administration. Et, aujourd’hui, le voile
est levé du côté de la bourgeoisie après l’arrestation du
puissant chef de gang, Clifford Brandt.
Selon Moise Jean Charles, lors des dernières élections
présidentielles, le papa de Clifford Brandt supportait Mme
Manigat et il lui avait donné des moyens financiers. Mais son
fils Clifford lui-même appuyait la candidature de Michel
Martelly. Clifford a son badge rose en tant que conseiller de
Martelly. On a arrêté un certain Carmelot, à Ouanamithe sur la
frontière, en possession de plusieurs milliers de dollars. Il
est le chauffeur de Ralph Féquière depuis 15 ans, depuis que ce
dernier était commissaire de Police au Cap-Haïtien, et ce dernier
n’est autre que le bras droit de Martelly.
Donc, Brandt est proche du gouvernement. Dans une fête
organisée chez Phèbe, commandant de la CAT Team (force spécialisé au service du Palais National pour assurer la
sécurité du président), dans la zone de Morisseau, commune de
l’Asile (dans le département de Nippes), Martelly y était, ainsi
que Clifford.
Alors, la famille
présidentielle n’est-elle pas proche du chef kidnappeur Clifford
Brandt ? |